Le temps est resplendissant aujourd'hui. Le soleil haut dans le ciel de l'après-midi baigne la pension. Fenêtre ouverte je regarde les élèves s'esclaffer insouciant du jour présent. C'est beau cette innocence, cette vie parfaite. Un sourire se dessine sur mon visage, devant ce petit spectacle. Je laisse tomber ma lecture pour contempler tout ceci. C'est le week-end. Aucun stress pour les cours. C'est un jour de repos. Les rayons du soleil viennent caresser doucement ma tête. Ça me berce, je m'endormirais presque, si le vent était moins froid. Mais il ne faut pas se leurrer. Nous ne sommes pas encore en été. Je me redresse du rebord et m'étire comme un chat, regardant du coin de l'oeil un jeune garçon et une jeune fille se détacher du groupe de jeune. Le jeune homme prend la demoiselle par la taille et l'embrasse tendrement. Ceci me fait rougir. La saint Valentin est passé. Et je l'ai laissé courir seule. Comme toujours. Mais enfin bon ! Je n'ai rien à faire, je pourrais aller lire dehors. Histoire de profiter du beau temps !

Je descends les escaliers tranquillement. Souriant aux élèves qui me souhaite un bon après-midi. C'est calme, c'est reposant. La vie est belle ! J'ouvre les portes pour sortir, une brise froide vient se loger sous mes vêtements. Je resserre ma veste orange sur ma robe blanche. Je ne sais pas si j'ai bien fait de porter ça. Il a beau faire un temps splendide, ce n'est pas la saison de porter des petites robes de printemps. Il fait encore un peu trop frais. Mais j'ai la flemme de remonter me changer. Peut importe ! Ce n'est pas un petit coup de vent qui va me dissuader d'aller prendre le soleil au grand air, tout de même ! Le sourire aux lèvres je m'avance dans la cour de l'établissement.

Je me trouve dans le parc de la pension. J'ai beau être ici depuis un an, je n'ai jamais vraiment mis les pieds dans ce lieu. Juste jusqu'au premier banc. Peut-être par pure flemme. Mais aujourd'hui j'ai envie de faire une chose folle... enfin je me comprends. Je vais aller vers l'inconnue ! Je tiens mon livre contre ma poitrine et me lance dans l'exploration de ce grand parc. J'espère que je ne me perdrais pas. J'ai tellement un sens de l'orientation... Médiocre ? Non pire que médiocre en fait. Il n'y a pas de réellement mot pour décrire mon niveau si bas. M'enfin bon ! En avant !

Voilà une petite heure que je parcours les parterres de fleur et les buissons à la recherche d'un endroit plutôt tranquille. Ici, c'est pas ce qui manque. Mais à chaque fois je vois un endroit encore plus beau que le précédent. Donc je bouge. Mais voilà. Là je pense que c'est la fin. Je pense que j'ai trouvé le bon endroit pour lire. La fontaine. Une grande et belle fontaine. Autour de celle-ci quatre bancs. Et contre toute attente, personne. Pas un rat. Juste le chant de la fontaine, moi et mon livre. Je me pose donc sur l'un des bancs et j'ouvre mon ouvrage. Hansel et Gretel. Ma mère me le lisait souvent, petite. Le bon vieux temps. Je l'ai retrouvé dans l'un de met nombreux sacs. Un vieille exemplaire. Il est en anglais.Une langue que je maîtrise plutôt bien. heureusement !

Je feuillette les pages, je lis les passages qui m'intéressent. Jusqu'au moment où j'entends un bruit qui me sort de ma lecture.

Les oiseaux, cet après-midi, sont d'humeur joyeuse. Un couple de pigeons se faisaient la cour sur le bord de l'eau. Que c'est beau l'amour. Ce que j'aimerais que Cupidon me touche de l'une de ses flèches un jour. Moi qui n'ai jamais connue l'amour. Je me demande d'ailleurs quel gout cela a... C'est sucré ? Acide ? Ou peut-être même salé ? Je ne sais pas. Mais peut-être qu'un jour je le saurais. Je suis encore jeune ! J'ai du temps devant moi, rien ne presse pour le moment.

Je relève la tête. Rien devant moi. Surement un potentiel petit animal qui court sur le gravier. Pourquoi mettre du gravier ? Quand on marche dessus cela fait du bruit. Un bruit qui scie les oreilles d'ailleurs. C'est assez désagréable, mais bon j'imagine mal autre chose. Je retourne à ma lecture. L'enfant est un petit être fort insouciant et naïf, un peu trop d'ailleurs. Mais c'est tellement... humain ?

« Bonjour Aika-chan... »

Quand j'entends ça, je sursaute. Je relève la tête aussitôt et regarde en provenance du son. Juste à côté de moi une connaissance. Tout près. Trop près même. Le jeune homme est tout sourire. Cela me fit rougir. J'ai horreur d'être trop près des gens. Ça me gêne. Je le regarde dans les yeux, ne disant rien. Nous nous fixons un bref instant, avant qu'il ne détourne le regard vers l'horizon. Je sens mes rougeurs disparaître.

« Bonjour Mr. Lawford ... vous m'avez fait peur... »

Je dis cela en souriant, un peu gênée. Il faut dire il est facile de me faire peur. Surtout avec cette discrétion et cette proximité si soudaine. En accompagnant mes mots, je ferme mon livre, regardant dans la même direction que le jeune surveillant. Derrière la fontaine on peut voir des arbres en rangs d'oignons, nus avec à peine quelques feuilles.

« Très bon choix de livre... ça me rappelle ma jeunesse... Enfant... à la montagne enneigée, au coin d'un feu... »

Je reporte moi aussi mon attention sur le livre. Une belle vieille couverture. Deux enfants qui s'avance vers une maison délicieuse et terriblement tentante encadré de feuille d'or avec un trompe l'oeil de moulures anciennes. Elle a terni avec le temps et les dorure ne sont plus aussi belle que par le passer. C'est qu'il a traversé les siècles cet ouvrage. Je hoche la tête, un léger sourire aux lèvres. Les contes allemands on toujours était très cruels, violent voir même sanguinaire. Et pourtant ce sont des contes pour enfants. Pour les enfants innocents... c'est un grand paradoxe.

Je relève la tête en inspirant. Regardant nulle part. J'ouvre la bouche, réfléchissant à ce que j'allais dire.

« ... Hum ... Pourquoi les contes allemands sont si cruels ... et pourquoi surtout ... on raconte ça à des enfants innocents ? »

C'était plus une question pour moi que pour lui. Mais poser les choses à voix haute, c'est toujours plus clair ensuite.

Je le regarde à présent dans les yeux. Son regard se fit plus doux, voir peut-être un peu triste ? Ce n'est pas si grave d'être seule. J'ai toujours trouvé ça plutôt idiot l'amour juste pour un jour. Après tout, un vrai couple ça s'aime toute l'année, non ? Je n'y connais strictement rien. Donc je n'en dirais rien de plus. Je me contente de sourire, comme toujours. Il prit une grande inspiration l'air un peu ailleurs. Je reporte mon attention sur le couple d'oiseau qui n'est toujours pas partis. Roucoulant innocemment. C'est mignon et un peu idiot en fait l'amour.

« ... Crois le ou non, mais ma saint valentin je l'ai passé aussi seul que toi. Mais bon, au fond ce sont pour les même raisons que toi... Je n'ai pas fait beaucoup d'effort pour être accompagné ce jour là bien que j'avais le temps... La poésie et la lecture ayant été ma seule compagnie ce jour là... Des romans qui font frissonner les plus marbreux... Des romans parlant d'amour, de passion et de colère.. Une histoire, des histoires... Bref... La vie... »

Il sourit tristement à présent. J'ai visé juste alors, il l'a passé seul. Je hausse les épaules, souriant toujours. Peut-être est-ce déplacer de ma part ? Enfin peu importe. J'aimerais bien le réconforter. Il parait que c'est plus dur pour un garçon de rester seul. Mais après, c'est juste ce que disent les magasins. Je n'ai pas le temps de faire un geste qu'il bouge déjà, regardant devant lui, toujours l'air pensif. Je n'aime pas voir les gens tristes. Ça me fait pleurer moi aussi.

« Mais au fond... Ce n'est pas si grave, puisqu'au fond, l'amour, le vrai, c'est quand on ressent la saint valentin chaque jours et non un seul jour pour le plaisir des marchands de chocolats et autres vendeurs.. Vous ne trouvez pas ? »

Il rigole doucement, à présent. Le couple d'oiseau s'envolent, le vent soufflent fort. J'ai la chair de poule. Il faudrait que je rentre, je pense. Le temps commence à se couvrir. Le temps est capricieux je trouve. Il faudrait qu'il se calme. Je me frictionne les bras.

« Vous avez raison Mr. Lawford... Le temps commence à se couvrir et je ne suis pas correctement habillé, je vais rentrer. »

Lui me tutoie, mais je n'arrive pas à faire de même. Peut-être qu'avec le temps ? Enfin bon, je me léve et me plante devant lui.

« Heureuse de vous avoir parlé ... Peut-être nous revérons-nous en dehors du cadre scolaire. »

Je lui fais un petit clin d'oeil et m'en vais.